Cinq à dix mètres. C’est la distance minimale entre les habitations et les zones d’épandage de pesticides proposée par le futur décret du gouvernement, alors que depuis des mois plusieurs maires de France exigent 150 mètres minimum : un sacré gap, urgent à combler !

Désobéir un peu, faire bouger les lignes… Partout en France, en ville comme en zone rurale, des maires ont pris des arrêtés interdisant l’usage des pesticides à moins de 150 mètres des habitations. Ils sont tombés de leur chaise en prenant connaissance des chiffres de distance minimale proposée en consultation publique durant le mois de septembre dernier par le ministère de l’Agriculture. De l’avis du ministre Didier Guillaume, les maires n’ont pas la compétence pour prendre de telles décisions, il faut s’en remettre à l’avis des scientifiques de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire) qui préconise 3 à 10 mètres de distance. Les plus courageux pourront lire les 20 pages au format PDF de l’avis relatif à une demande d’appui scientifique sur les mesures de protection des riverains lors de l’utilisation des produits phytosanitaires.

 Carte des communes ayant pris un arrêté anti-pesticides

Outre un bon historique d’une polémique qui ne date pas d’hier, l’enquête de France Inter sur les soixante communes qui ont pris des arrêtés anti-pesticides montre aussi le ping-pong politicien d’un gouvernement qui se repose sur ses lauriers : depuis le 1er janvier 2017, l’utilisation des pesticides est déjà interdite dans les espaces publics, et depuis le 1er janvier 2019 chez les particuliers. Mais ce n’est pas suffisant !

Enfin tout dépend de quel point de vue on se place. Pour les agriculteurs, ne serait-ce que 5 mètres de moins signifie un gros manque-à-gagner alors qu’ils affirment maîtriser l’épandage au centimètre près et ne pas travailler comme des bourrins. Certes. Du coup les campagnes s’enflamment ces derniers jours pour montrer le ras-le-bol agricole. D’un autre côté, certains agriculteurs sont conscients que ce n’est pas avec une eau qui n’en demeure pas moins polluée par les pesticides, que l’on pourra éteindre le feu.

Dans les deux camps opposés, au contraire on remet de l’huile dessus. Ou plutôt de l’urine. Ainsi, pour exprimer son soutien aux agriculteurs, un maire se fait remarquer avec un arrêté farfelu interdisant aux administrés d’uriner près des surfaces cultivées. Mais croyant faire le malin, finalement, celui-ci apporte de l’eau au moulin de la campagne « J’ai des pesticides dans mes urines et toi ? », dont l’argumentaire est étayé et édifiant, s’il fallait nous rappeler les dangers des pesticides pour la santé – cancer, infertilité, maladie de Parkinson, incidences sur le développement des fœtus et des enfants…

Alors que faire ? Commençons par balayer devant notre porte en adoptant les bons gestes au jardin et au potager que nous rappelle écoconso.be. Achetons bio ou des produits issus de la culture raisonnée, autant que possible, relaye 20minutes.fr. Difficile ? Le journaliste Jean-Christophe Batteria nous conseille d’éplucher au maximum fruits et légumes et de les cuire à la vapeur. On peut aussi les rincer au bicarbonate de soude : une recette à l’efficacité… scientifiquement prouvée !

POUR ALLER PLUS LOIN

NDLR – En juillet 2019, Mediapart a dévoilé une base de donnée inédite sur les achats de produits phytosanitaires par commune. Cette carte avait été publiée une première fois par le ministère de la transition écologique en juin 2018, puis retirée sous la pression des lobbys agricoles.

Carte Mediapart- des produits phytosanitaires par commune

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Photos : © Ethnomedia / jcm