Au 1er novembre, les fumeurs sont invités à se passer de cigarettes pour au moins 30 jours. Décryptage de cette façon positive de lutter contre le tabagisme, inédite en France, mais fructueuse au Royaume-Uni.
Le constat est amer : après cinq années de baisse, alors même qu’était lancé le Programme national de réduction du tabagisme, la consommation est repartie à la hausse l’an dernier. Avec près d’un tiers de fumeurs chez les plus de 15 ans, la France reste un cancre sur ce front, où l’on enregistre 73.000 morts par an (et peut-être plus).
Dans ce contexte de relatif échec, les autorités multiplient les angles d’attaque. Tandis que les paquets neutres arrivent chez les buralistes et qu’une hausse des prix est annoncée, il n’est pas question de renoncer à la dissuasion, mais d’engager par ailleurs une approche positive qui a fait ses preuves en Grande-Bretagne : le mois sans tabac.
Partant du principe que plus d’un fumeur sur deux voudrait arrêter, l’idée est de l’y encourager et de l’accompagner dans cette démarche, plutôt que de ressasser des messages anxiogènes et d’évoquer les dangers du tabagisme. La campagne “Moi(s) sans tabac” met l’accent sur les bénéfices d’une rupture avec la clope et en offre l’occasion.
L’opération, en forme de défi presque ludique, joue de différents ressorts psychologiques. Pour ne pas brusquer les plus dépendants, on les incite seulement à une trêve de 30 jours. On sait qu’après ce délai, le sevrage est acquis et les chances d’arrêt définitif sont cinq fois plus grandes. On ne culpabilise pas le fumeur, on le met au défi d’essayer, espérant que, piqué au vif, il se prêtera au jeu et se fera un point d’honneur de tenir.
La dimension collective du pari est aussi importante. Derrière le slogan “en novembre, on arrête ensemble”, cette campagne, qui s’inspire des recettes du marketing social, compte à la fois sur l’émulation entre les participants, le soutien de leurs proches et le regard bienveillant de la collectivité.
Extrait de la campagne « Moi(s) sans tabac »
Les fumeurs pourront aussi s’appuyer sur des outils d’accompagnement conçus spécialement par Tabac info service, dont la nouvelle application pour smartphone se veut un coach personnalisé. Enfin, un kit gratuit d’aide à l’arrêt est disponible en pharmacie depuis le 10 octobre. N’espérez pas y trouver une aide médicamenteuse ou des substituts nicotiniques, mais de la documentation.
Cette campagne d’un genre inédit en France, sera-t-elle aussi efficace que son modèle britannique ? Rendez-vous dans quelques mois pour un premier bilan.
En attendant, voici notre tour d’horizon des lectures utiles.
• Incontournable, le site Tabac info service chapeaute l’évènement. On peut s’y inscrire pour un suivi personnalisé, télécharger le kit “papier” et l’application pour smartphone ou encore y consulter un annuaire des tabacologues et toutes sortes de conseils.
• A ceux qui penseraient qu’il est trop tard pour eux, on recommande l’article de Ouest France sur les bénéfices d’un arrêt, mesurables dès le premier jour.
• Pourquoi Docteur insiste sur l’orientation résolument positive du Mois sans tabac et propose une interview de son coordinateur.
• Sur le site de Santé Publique France, le directeur général explique cette nouvelle stratégie. On en profitera pour récupérer le guide pratique pour arrêter (PDF).
• Le Bulletin épidémiologique dresse le bilan des comportements, de la mortalité et des dispositifs d’aide au sevrage, en particulier du service téléphonique 39 89 et de Stoptober, le mois sans tabac outre-Manche.
• A propos de l’exemple britannique, on trouvera les « clés du succès de l’opération Stoptober » dans La Dépêche et son analyse par l’INPES (PDF).
• L’avis des professionnels de santé est partagé. “Plus on tente un arrêt, plus on risque de s’arrêter”, se félicite un tabacologue sur RMC, cependant le kit distribué en pharmacie n’est pas à la hauteur, selon son collègue interrogé par France Info.
• Le Journal international de médecine, assez critique à l’encontre du gouvernement dans la lutte contre le tabagisme, estime que cette campagne pourrait sauver son bilan.
• On ne partagera pas nécessairement le scepticisme du blog vapoteurs.net, mais on constatera avec lui que la cigarette électronique reste tabou, alors que son rapport bénéfices/risques semble positif.
• Contrairement à leurs homologues britanniques, nos autorités sanitaires en refusent la promotion, en revanche elles viennent d’annoncer un forfait annuel de 150 euros pour favoriser l’accès aux autres méthodes de sevrage.
Crédits
Vidéo : © Ethnomedia / jcm pour Apivia Prévention
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