Que l’on soit en situation de handicap physique ou sensoriel, l’accessibilité aux lieux et aux informations est encore très problématique en France. Or, les personnes en situation de handicap ne peuvent être autonomes que si l’environnement est adapté. Aujourd’hui, trop d’obstacles quotidiens continuent à les discriminer.

Une loi datant de mars 2021 prévoit que les candidats à la présidence de la République doivent veiller « à l’accessibilité de leurs moyens de propagande électorale aux personnes en situation de handicap, en tenant compte des différentes formes de handicap et de la diversité des supports de communication ». Cette accessibilité concerne les lieux où sont organisées les réunions publiques, les sites internet des candidats, les vidéos… Selon un relevé du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), il semble que les différents candidats avaient encore des progrès à faire !

Le président du Collectif handicaps déplorait récemment, dans les lignes de handicap.fr, que rien ne change vraiment sur le front de l’accessibilité… malgré les bonnes intentions affichées, qui nourrissent les opérations de communication, les rapports et les annonces depuis la loi d’orientation de 1975 en faveur des personnes handicapées et, surtout, de la loi ambitieuse de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Le principe de la loi de 2005 : un devoir de solidarité et d’accessibilité à l’égard de toutes les personnes en situation de handicap

Cette loi a créé une série de droits et d’obligations, parmi lesquels la création des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), l’obligation d’accessibilité des lieux accueillant du public, des logements, des transports publics, le droit à la scolarité, à l’emploi, l’accessibilité aux services, aux soins, aux outils numériques et aux programmes de télévision… Elle fait de l’accessibilité un enjeu sociétal qui permettra « l’autonomie et la participation des personnes ayant un handicap ». Pour cela, son objectif est de réduire, voire supprimer, les « discordances entre les capacités, les besoins et les souhaits d’une part, et les différentes composantes physiques, organisationnelles et culturelles de leur environnement d’autre part ». En clair, l’idée qu’une personne n’est handicapée qu’en raison de l’inadaptation de son environnement social, qui la place dans une situation handicapante, a fait son chemin. C’est donc à l’environnement et au contexte social de s’adapter, pas aux personnes.

Le principe de l’accessibilité universelle (Article 9 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’Organisation des Nations Unies) est une des revendications prioritaires des associations.

La réalité : l’accessibilité des personnes en situation de handicap est encore trop partielle

Les objectifs d’accessibilité, avec la prise en compte des spécificités de chaque handicap, sont loin d’être atteints. Dès 2011, le gouvernement avouait d’ailleurs que la mise en œuvre de la loi de 2005 se révélait plus difficile que prévu. Sa décision d’allonger les délais de mise en conformité et d’assouplir la réglementation de l’accessibilité, notamment par l’instauration des Agendas d’Accessibilité Programmée (Ad’AP), fut dénoncée par les associations qui, aujourd’hui encore, constatent « un réel manque d’implication d’un certain nombre d’établissements recevant du public (ERP) mais aussi de villes et villages pour faire progresser l’accessibilité universelle de leurs ERP, de la voirie, des transports, des logements, des moyens de communication » (source : APF France handicap).

Transports publics, éducation, santé, loisirs : la discrimination des personnes en situation de handicap est toujours tenace

Avec une seule ligne de métro accessible à Paris, 17% des gares régionales en province, des commerces de proximité, des cabinets médicaux, des restaurants, des lieux de vacances, difficilement, voire pas du tout accessibles, des élèves mal accueillis à l’école et dans les universités, un taux de chômage plus important chez les personnes en situation de handicap, les droits peinent à être appliqués et la situation est loin d’être satisfaisante. Cela pourrait paraître anecdotique, mais ne l’est pas : la représentation du handicap reste très marginale sur les écrans. Or, l’absence d’images montre la difficulté de la société  d’inclure la différence dans le champs de son identité et de ses représentations collectives, voire sa propension à la discriminer et à la stigmatiser… et à ne pas toujours considérer l’accessibilité comme une priorité absolue.

Le regard sur le handicap et le respect des droits des personnes en situation de handicap semblent enfin évoluer

Malgré les freins culturels et économiques, la prise de conscience que tous les membres d’une société ont les mêmes droits, et que l’environnement social doit pouvoir s’adapter à tous, semble réelle. Qu’elles soient auditives, visuelles, motrices, intellectuelles ou psychiques, la société dans son ensemble manifeste plus d’égard pour ces différences. Et si la situation progresse trop lentement, elle progresse. Pour finir sur une note optimiste, les résultats d’une enquête de l’IFOP, réalisée en février 2022, révèlent que le « niveau de satisfaction exprimé par les personnes en situation de handicap concernant la dernière consultation médicale s’avère élevé et proche de celui enregistré auprès de l’ensemble des Français ». Leur dernier rendez-vous leur a laissé suffisamment de temps pour échanger avec le médecin et s’exprimer, bien que les difficultés pour obtenir une consultation auprès d’un médecin spécialiste subsistent. C’est une avancée importante dans un contexte de discrimination et de refus de soins opposés par certains médecins, trop peu formés aux situations de handicap. L’accessibilité est aussi affaire de regard et de connaissance sur les différences.

Texte : © J.-C. Moine / Ethnomedia
Photo : ©Nadia Doloh – Pexel