Voici un article à lire aux toilettes en cinq minutes, soit le temps de la grosse commission. Allez, dix si vous cliquez sur un ou deux liens. Quoi ? Faire caca, ça vous prend plus longtemps ? Raison de plus pour lire cette page !
Comment ça va, vous ? Si on était au temps de Louis XIV, ça équivaudrait à demander « comment allez-vous… à la selle ? » En effet, le caca, sa consistance, son odeur, étaient les principaux indicateurs de la santé de l’interlocuteur. Et, de fait, ça n’a pas vraiment changé aujourd’hui. Mais on n’ose plus en parler. Alors que nos crottes en disent long sur notre santé !
Constipé, ce n’est pas une fatalité
Les troubles intestinaux restent un sujet tabou. Prenons la constipation. Près d’un patient « bien portant » sur trois est un constipé qui s’ignore, qui minore la gravité de ses troubles. Alors que, pour les médecins, des selles peu fréquentes demeurent un élément essentiel de diagnostic.
Les standards internationaux de santé définissent la constipation comme correspondant à moins de trois évacuations par semaine. Il faut distinguer la constipation de transit de la constipation d’évacuation. La première se caractérise par des selles peu fréquentes, ce qui n’est en soi pas un problème tant que le patient n’en ressent pas de gêne. Une personne qui mange peu, ou des aliments sans résidus, peut très bien aller à la selle une seule fois par semaine. La constipation de transit devient plus inquiétante si elle est accompagnée d’une constipation d’évacuation, qui, elle, implique des efforts de poussée, une sensation de gêne au passage des selles ou d’évacuation incomplète, un caca dur qui nécessite des manœuvres digitales… Pas facile à déballer, même devant son médecin, tout ça !
Constipation passagère ? Elle sera facile à traiter en mangeant des pruneaux (raisonnablement !), en privilégiant les aliments à fibres (pain complet, légumes verts), et en buvant de l’eau riche en sulfates, aux vertus laxatives et diurétiques. Les championnes : l’eau d’Hépar®, de Courmayeur® et de Contrex®. Mais inutile de vous infliger de boire des litres, il semblerait que l’injonction de boire beaucoup d’eau repose sur une idée reçue. Mieux vaudra reprendre un peu d’activité physique, efficace pour déclencher l’envie d’aller à la selle.
Vous pouvez aussi essayer un truc tout simple, mais qui paraît logique : changer de position pour déféquer, soit passer d’assis à accroupi pour éviter de faire un coude avec son canal intestinal, en posant ses pieds sur un marchepied ou sur un squatty potty®. La pub est déjantée et en anglais, mais le fond est complètement tangible. Regardez, vous comprendrez. Ça donne envie d’essayer, non ?
Une constipation chronique, c’est-à-dire qui dure depuis 6 mois ou plus, fera l’objet d’une prescription médicale de laxatifs. N’hésitez pas à consulter si, pour vous, le passage aux toilettes devient un problème. Plus que votre femme ou votre mari, votre voisin, vos enfants ou même votre mère, votre médecin reste la personne la mieux placée pour recevoir vos confidences en la matière (fécale).
L’échelle de Bristol est une échelle visuelle répartissant les selles humaines en sept types. Les types 1 et 2 indiquent une constipation.Les types 3 et 4 sont les selles idéales (en particulier le type 4, plus agréable à évacuer). Les types 5 à 7 tendent de plus en plus vers la diarrhée.
Ne pas se laisser déborder par la diarrhée
Idem pour la diarrhée. Rien que pour l’écrire correctement, avec ses deux r et ses deux e et le h bien placé, on en ch…
Selles de consistance liquide ou molle, plus volumineuses et nombreuses qu’à l’habitude (plus de 3 fois par jour), la diarrhée peut avoir plusieurs causes, qui vont de l’intoxication alimentaire au stress, en passant par la gastroentérite virale, une intolérance au lactose, ou une hyperthyroïdie. À savoir aussi que la prise de certains antibiotiques peut altérer la flore intestinale, c’est pourquoi votre médecin vous prescrira le cas échéant des probiotiques comme l’Ultralevure® (c’est la bonne bactérie Lactobacillus que l’on trouve aussi dans n’importe quel yaourt tout simple).
Les globe-trotters, quant à eux, connaissent bien la tourista, diarrhée infectieuse contractée durant un voyage. Elle n’est donc pas une maladie, mais un symptôme qui se déclenche lorsque l’on ingère de l’eau ou des aliments contaminés. Elle dure 1 jour ou 2, puis disparaît sans nécessiter de traitement particulier, avec un régime alimentaire à base de riz, carotte, banane, chocolat noir à haut dosage en cacao. Hé oui, bon prétexte pour les gourmands, le chocolat noir a un effet astringent, parmi d’autres qualités que vous découvrirez plus bas dans l’article pour une révélation.
La majorité des diarrhées sont dites aiguës, ce qui signifie « d’installation récente et de courte durée », donc rien à voir avec l’intensité des symptômes. Elles sont inoffensives et se soignent très facilement. Buvez régulièrement (eaux minérales, bouillon de légumes salé, thé, tisane, à température ambiante. Ne surtout pas boire glacé). Pas de lait, pas de gras, pas trop de fibres : on oublie les 5 fruits et légumes crus par jour pendant un petit moment et on laisse tomber les céréales complètes type « Brain-Brain » (NDLR : référence de notre rédactrice à une fausse pub hilarante des Nuls :-). Attention aux produits sans sucre tels les sodas, bonbons et chewing-gums, truffés de sorbitol à effet laxatif.
En revanche, il faut absolument consulter un médecin dans les plus brefs délais si l’un ou l’autre des signes suivants se manifeste : une diarrhée très abondante (plus de 10 selles par jour) qui persiste plus de 48 heures ; des signes de déshydratation, surtout chez un jeune enfant ou une personne âgée ; de la fièvre ; du sang dans les selles ; de fortes douleurs abdominales.
Et si la diarrhée dure depuis des semaines, n’attendez plus, elle peut être le signe, pour le coup, d’une maladie plus grave comme la maladie de Crohn, le syndrome de l’intestin irritable ou une infection à la bactérie Clostridium difficile, si l’on a été sous antibiothérapie. Cette dernière porte bien son nom car elle rend la vie compliquée ! Elle se développe dans une flore intestinale affaiblie par un traitement antibiotique qui aura détruit les bactéries amies, et provoque des diarrhées. Pour soigner cette maladie, mais aussi d’autres maladies gastro-intestinales comme la maladie de Crohn, les médecins ont une nouvelle technique : la transplantation de microbiote fécal. En pratique, il s’agit de transférer par voie orale (en capsules) des extraits fécaux issus des selles d’une personne saine dans les intestins du patient. Pas très ragoûtant dans l’idée, certes, mais le fait est que ça marche !
Les promesses infinies de l’intestin
Revenons maintenant à notre chocolat noir (et ce n’est pas une métaphore). Figurez-vous que le carré convoité est un prébiotique : il active les bonnes bactéries de l’intestin. Quand vous mangez du chocolat noir, elles croissent et le fermentent en produisant des composés anti-inflammatoires. Ces bonnes bactéries se développent au détriment d’autres bactéries du tube digestif, comme notre saleté de C. difficile ou la vilaine E. coli, qui sont, elles, associées à l’inflammation et peuvent causer des gaz, des ballonnements, de la diarrhée et de la constipation.
En réalité, et c’est là que votre vie intestine va basculer, tout se joue dans le microbiote intestinal, nouveau nom de la « flore intestinale ».
Notre intestin abrite un immense écosystème bactérien, commun à tous mais propre à chacun. Nous vivons en réalité en symbiose avec une population de 100 000 milliards de micro-organismes vivants (bactéries, virus, champignons) nichés tout le long de notre tube digestif et particulièrement dans notre colon. C’est dix fois plus que le nombre de cellules constituant le corps humain ! Cette communauté microbienne, présente dans l’intestin dès la naissance, est considérée depuis peu comme un organe à part entière par les scientifiques. Un organe de poids, au sens propre, puisqu’il pèse deux kilos à lui tout seul – il est plus lourd que notre cerveau.
À quoi sert le microbiote ? Déjà, il participe directement à la digestion : fermentation des résidus alimentaires non digestibles, assimilation des nutriments, synthèse de certaines vitamines (vitamine K, B12, B8) pour fournir de l’énergie à nos cellules. Mais on a découvert que les microbes de la flore intestinale assurent l’équilibre du corps et communiquent avec le système immunitaire, le cerveau et le système nerveux. On sait aujourd’hui qu’une altération du microbiote est associée à la majorité des maladies chroniques contemporaines, à commencer par les maladies inflammatoires de l’intestin, comme la maladie de Crohn, mais pas seulement ! L’influence du microbiote concerne aussi l’obésité, le diabète, certaines allergies…
Ce qui est plus stupéfiant, c’est que le microbiote intestinal a aussi une incidence sur certaines maladies inflammatoires articulaires, certaines maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson, mais aussi psychiatriques : certaines formes d’autisme, la schizophrénie, les syndromes bipolaires ou la dépression résistante…
Bande annonce du documentaire : Le ventre notre deuxième cerveau
POUR ALLER PLUS LOIN
• Un dossier chapitré très pédagogique sur la diarrhée, avec un rappel utile du processus de digestion, par nos confrères de passeport santé.
• Constipation et diarrhée peuvent être les symptômes du colon irritable, nous rappelle l’INSERM.
• L’Inra, numéro un mondial de la recherche sur la métagénomique du tube digestif humain, soit l’analyse du microbiote intestinal, titre son dossier grand public : Microbiote intestinal, nouvel organe au potentiel extraordinaire.
• Le chocolat est bon pour votre microbiote intestinal, c’est prouvé !
• On vous conseille la lecture d’un podcast passionnant de France Inter qui synthétise tout ce qu’on veut savoir sur le microbiote intestinal.
• A lire ou relire : Le charme discret de l’intestin de Giulia et Jill Enders.
• Et, enfin, des livres pour apprendre aux enfants à connaître cette partie du fonctionnement humain :
– Caca prout de Catherine Dolto et Colline Faure-Poirée, illustré par Robin.
– Léon l’étron de Patrice Killoffer.
– De la petite taupe qui voulait savoir qui lui avait fait sur la tête de Werner Holzwarth, illustré par Wolf Erlbruch.
Crédits
Vidéo : © Ethnomedia / jcm pour Apivia Prévention
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