Si le sport peut perturber le sommeil quand il est pratiqué tardivement de manière trop intensive, une activité physique régulière aide au contraire à bien dormir.

Une activité physique régulière favorise un bon sommeil

L’activité physique contribue à une sensation générale de bien-être psychologique. Or, quand on se sent bien mentalement, on laisse le stress dans ses pantoufles au pied du lit et on chasse plus facilement les pensées anxiogènes une fois sous la couette. A cette conséquence indirecte de l’exercice physique sur le sommeil, il faut en ajouter une plus directe, liée à des phénomènes biochimiques, notamment la synthèse et la libération d’hormones, sur lesquelles nous pouvons dans une certaine mesure agir pour améliorer nos nuits. En l’occurrence, en bougeant.

Parmi les multiples effets biochimiques d’une activité physique, il faut s’arrêter en particulier sur l’augmentation du taux de tryptophane dans le cerveau. Lors d’un exercice physique prolongé, cet acide aminé essentiel, qui provient des aliments protéinés (viandes, poissons, laitages…), est libéré par les muscles et se dirige vers le système nerveux central où il se transforme en sérotonine. Or, la sérotonine intervient non seulement dans la régulation des émotions, mais aussi dans la qualité de notre sommeil. Quand la lumière baisse, la sérotonine subit en effet des métamorphoses qui conduisent à la synthèse de mélatonine, une hormone impliquée dans la phase d’endormissement et dont l’action se prolonge pendant les premières heures de la nuit. Indispensable pour sombrer délicieusement dans les bras de Morphée, la mélatonine augmente la durée du sommeil lent profond, la phase de sommeil qui permet la récupération de la fatigue physique. De manière schématique, bouger pendant la journée permet donc de libérer efficacement le tryptophane pour produire suffisamment de sérotonine en mesure de synthétiser de la mélatonine quand l’heure de dormir est arrivée.

Une des conditions nécessaires est d’avoir fait des repas équilibrés car, paradoxalement, si le tryptophane se trouve dans les aliments protéinés, ce n’est pas en mangeant une énorme côte de bœuf que l’on optimise la synthèse de sérotonine dans le cerveau. Les protéines contiennent de nombreux acides aminés différents, et le cerveau a besoin que la concentration de tryptophane soit plus importante que celle des autres acides aminés pour synthétiser la sérotonine. Il faut, pour révéler le potentiel des protéines, les associer à des glucides (pâtes, céréales…) : ce sont eux qui favorisent la concentration de tryptophane dans l’organisme et facilitent d’autant mieux son passage dans le cerveau que l’on aura fait du sport. Ce n’est pas sans raison que notre santé est dépendante à la fois de notre alimentation et de notre activité physique : aliments et mouvements agissent en synergie.

La pratique régulière d’une activité physique aurait une action préventive et curative sur l’apnée du sommeil

Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) est une maladie chronique qui se caractérise par une réduction intermittente de la disponibilité en oxygène et un sommeil fragmenté. Les conséquences sur la santé vont de la fatigue chronique à des troubles de l’humeur, en passant par des risques accrus d’hypertension artérielle, d’accident cardiaque et d’obésité.

Selon une étude australienne (en anglais), le fait de coupler quotidiennement huit minutes d’activité intensive à vingt minutes de marche permettrait de limiter de 10 % le risque de développer une apnée du sommeil. Dans le cadre d’une prise en charge médicale, l’activité physique seule ne peut être une solution, mais elle mérite, selon certains médecins, d’être ajoutée au protocole de traitement de l’apnée du sommeil pour améliorer les symptômes et la qualité de vie des patients. Des témoignages, s’ils n’ont valeur de preuve, attestent des bienfaits de la marche nordique dans la réduction significative du nombre d’apnées nocturnes.

L’activité physique en soirée n’est pas à proscrire

Pratiquer une activité physique douce, comme le yoga ou la marche en soirée n’empêchera pas de dormir. Mais qu’en est-il d’une activité sportive un peu plus vigoureuse ? Plusieurs études ont montré qu’elle ne perturbe pas le sommeil (en anglais) à condition que son intensité reste modérée (suffisamment soutenue pour ne plus pouvoir chanter, tout en maintenant la capacité de parler). Pratiquer un sport intense, comme le basket, en fin de journée réveille en effet le corps à un moment où il commence à baisser sa température et son rythme cardiaque pour se préparer à la nuit. Des chercheurs estiment que se coucher moins de deux heures après la fin d’un tel effort physique perturbe l’endormissement, diminue la durée de sommeil et affecte le sommeil paradoxal, cette phase durant laquelle on rêve et qui joue un rôle important dans les apprentissages et la mémoire à long terme. En revanche, un exercice physique se terminant deux heures avant le coucher favoriserait le sommeil. Ceux qui ne peuvent pas faire autrement que de prendre leur shoot d’endorphines à ce moment de la journée, et dont le sommeil est perturbé, devraient commencer leur séance de sport un peu plus tôt, réserver ces séances à des activités d’endurance plutôt qu’à des entraînements cardio, éviter la compétition, ne pas négliger la récupération et la période de retour au calme et prendre une douche tiède avant de se coucher. Le respect de ces quelques règles devrait contribuer à faire des sportifs du soir des dormeurs heureux.

Crédits

Texte : JC Moine / Ethnomédia 

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