La perte progressive de l’audition est inhérente au vieillissement, mais dans une très large mesure, la technique permet désormais d’y remédier. Le tout est de ne pas traîner et de se tourner vers de « vrais » professionnels de santé.

L’oreille est un organe sensoriel complexe et fragile qui peut être sujet à de nombreux traumatismes, malformations et pathologies, de sorte que l’on ne saurait faire de généralité dans la prise en charge des problèmes d’audition qui peuvent en découler. Mais il est au moins une certitude que l’on peut asséner : à tout âge, et quel que soit la gêne ou le déficit auditif, conscient ou pas, il sera d’autant moins préjudiciable, et pourra être d’autant mieux corrigé, que l’on s’en rendra compte précocement.

C’est la raison pour laquelle, le dépistage néonatal de la surdité congénitale, qui frappe environ un millier d’enfants par an en France, est systématiquement proposé aux parents, avant la sortie de la maternité et, si un doute persiste, dans les trois premiers mois.

Pour la petite proportion d’enfants qui naissent avec un handicap auditif, susceptible d’entraîner un retard de développement cognitif, c’est l’opportunité, dès les premiers jours de vie, de compenser la défaillance de ce sens par le langage corporel et les expressions du visage. Lorsqu’un appareillage externe ou la pose d’implants auditifs est possible, l’acquisition du langage oral sera d’autant plus aisé que l’on s’y prendra tôt. Dans les rares cas où la médecine reste impuissante, l’apprentissage, en famille, de la langue des signes pourra commencer sans tarder. Ce n’est pas rien.

A l’autre bout de la vie, équivalent moins connu de ce qu’est la presbytie pour la vue, la presbyacousie est une conséquence inévitable du vieillissement, qui affecte notre ouïe. Nous partons dans l’existence avec un capital auditif limité, fonction de l’épuisement des cellules ciliées de la cochlée (dans l’oreille interne), qui traduisent les ondes sonores en signaux nerveux interprétables par le cerveau. Hélas, ces cils ne repoussent pas, et sont très sensibles aux agressions : surexposition au bruit dans nos loisirs et/ou au travail, otites et autres maladies infectieuses, empoisonnement médicamenteux, etc.

Surveiller son ouïe est essentiel au bien vieillir

Au-delà du confort de vie, l’enjeu d’un dépistage précoce est aussi d’ordre cognitif chez les personnes âgées. Une surdité non traitée entraîne en effet un isolement social, avec pour corollaires probables une altération de l’attention, de la mémoire ou encore des capacités d’expression, autant de facteurs aggravants de maladies neurodégénératives telles qu’Alzeihmer… On peut largement limiter les risques, pour peu que la déficience auditive soit détectée assez tôt et que le patient dispose des moyens (financiers) de s’équiper.
Hormis dans le cas des nouveau-nés ou de certains professionnels soumis à des niveaux sonores excessifs, que la médecine du travail suit avec une attention particulière, il revient à chacun de veiller sur ses oreilles et de réagir au plus vite en cas d’alerte. Une surdité soudaine qui ne s’estomperait pas après quelques heures doit, sans tergiverser, vous conduire aux urgences les plus proches dans les 24H, pour préserver ce qui peut l’être. Que la surdité temporaire soit de nature mécanique, parce que l’on a pris un coup sur l’oreille externe, ou perceptive, parce que l’on a « brûlé » ses cochlées, au premier rang d’un concert, il est essentiel d’agir vite.

Le plus souvent cependant, la surdité progresse de façon discrète et lente. Le patient n’a peut-être pas conscience d’entendre moins bien, mais il peut, par exemple, souffrir d’acouphènes, des sons parasites dont il ne comprend pas la provenance, ou d’hyperacousie, soit une sensibilité parfois douloureuse à certaines fréquences sonores. Ce peut être le signe d’une détérioration de l’acuité auditive qui mérite de consulter son médecin traitant. Suivant le parcours de santé habituel, ce dernier posera quelques questions d’usage et procédera à un examen de l’oreille, avant d’orienter le patient vers un ORL pour des tests approfondis de l’audition.

Le plus commun chez les adultes, l’audiométrie tonale, consiste à soumettre le patient à des sons émis à différentes fréquences pour vérifier qu’il les entend. L’examen, rapide et totalement indolore permet d’établir les seuils d’audition pour chaque oreille. Plus concrète, l’audiométrie vocale, qui vise à évaluer le niveau de compréhension, demande de répéter des mots simples prononcés avec plus ou moins d’intensité. En fonction de ces examens, on évalue et exprime le degré de perte auditive en décibels : légère, de -20 à -40 dB, moyenne, de 40 à 70 dB, sévère, de 70 à 90 db, ou profonde au-delà, ce qui revient à proprement parler d’une totale surdité.

 

Gare au mirage des assistants d’écoute bon marché

La bonne nouvelle est que d’immenses progrès technologiques ont apporté des solutions de plus en fines et raffinées, dans leur forme comme dans leurs prestations. Le frein esthétique ne tient plus, les prothèses auditives étant désormais discrètes. Celui de la gêne ressentie, car les appareils d’autrefois semblaient incapables d’opérer un tri entre les sons à amplifier, a volé en éclat grâce au numérique, beaucoup plus sélectif. Mais attention, une audioprothèse n’est pas le genre de produit que l’on sort de l’emballage et qui fonctionne dans l’instant. Il faut souvent des semaines d’ajustements opérés par un professionnel de santé.

C’est là que le bât blesse, car, si le remboursement forfaitaire de la sécurité sociale est de 120 euros par oreille, le coût de revient est au bas mot de 1500 euros en moyenne (soit environ 3000 euros pour un appareillage complet). Le montant est dissuasif, d’autant qu’il faut payer comptant pour une prestation qui va s’étirer sur des mois, dans un contexte commercial où, par le jeu du numerus clausus, les fabricants de prothèses auditives et les audioprothésistes sont en situation de monopole.

 

Des groupes industriels, en particulier des distributeurs de lunettes rompus à ce genre d’exercice, ont décidé de casser les prix. Pour attirer le chaland et le convaincre qu’il a besoin de leurs services, certains marchands contournent astucieusement la loi, en proposant de pseudo tests auditifs, notamment sur Internet, qui n’ont pas la moindre valeur scientifique. A la clé, il est fort à parier, si vous vous y soumettez, que l’on vous recommandera d’acheter non pas une « aide auditive », mais un « assistant d’écoute » librement vendu en pharmacie. Bien moins coûteux, car il ne nécessite aucun réglage individuel, cet amplificateur sonore peut être une solution d’appoint, en cas de perte d’audition légère. Attention cependant à ne pas le prendre pour ce qu’il n’est pas et, sur la foi d’un test peu crédible, à ne pas passer à côté d’un problème grave.

Si, du point de vue des consommateurs qui n’ont pas les moyens de s’offrir autre chose, il n’est peut-être pas plus mal que de nouveaux acteurs aient mis un coup de pied dans la fourmilière, d’un point de vue médical, il est très clair que la prestation de ces appareils n’est en aucun cas la même.

On le répète donc : quel que soit votre âge, si vous ressentez la moindre gêne auditive, allez donc voir votre généraliste qui vous orientera si besoin vers un médecin ORL, mais ne vous fiez pas à ces offres gratuites dictées par des intérêts commerciaux. Ce serait courir le risque de passer à côté d’une affection autrement plus grave qu’une « simple » perte auditive.

POUR ALLER PLUS LOIN

• L’association JNA (Journée Nationale de l’Audition) propose un site très riche qui répond à toutes les questions.
• Un aide-mémoire synthétique, Surdité et déficience auditive, est édité par l’OMS.
• Le site cochlea.org, propose lui aussi de nombreuses informations sur tout ce qui touche à l’audition et à ses principales pathologies.

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