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Rencontre avec Gaël Chételat, directrice de recherche à l’Inserm, et Stéphanie Maulay, sophrologue, enseignant la méditation — Durée 7:10 mn

La dernière étude en date, d’une ampleur inédite, ne porte pas seulement sur la méditation, mais plus largement sur les façons d’améliorer le bien-être et la santé mentale des plus de 65 ans, qui représentent une part grandissante de la population et donc un enjeu majeur. Nous avons rencontré la coordinatrice de ce projet européen baptisé « Silver Santé Study ».
Gaël Chételat, directrice de recherche Inserm au centre d’imagerie médicale Cyceron de Caen, travaille depuis une quinzaine d’années sur le vieillissement et les démences. Son unité essaie de comprendre les mécanismes physiologiques à l’origine des maladies neurodégénératives. A terme, l’objectif est bien sûr que cette meilleure compréhension permette le développement de médicaments pour contrecarrer ces processus. La recherche de l’équipe de Gaël Chételat vise aussi à déterminer comment prévenir ces pathologies, et au-delà, améliorer les conditions de vieillissement, en agissant sur certains facteurs de vie. Il ne fait par exemple pas de doute que l’anxiété, les problèmes de sommeil, la rumination ou encore l’isolement nuisent au bien-être. Et l’on est presque certain qu’ils augmentent les risques de maladie d’Alzheimer. De là, l’intérêt des chercheurs pour la méditation, comme l’explique la neuroscientifique dans notre vidéo.

En quoi le projet Silver Santé Study est-il unique ?

Jusqu’à présent, la plupart des travaux scientifiques sur la méditation ont mis en évidence ses effets après huit semaines de pratique. C’est assez pour affirmer que cet entraînement de l’esprit a une incidence sur la structure et le fonctionnement du cerveau, mais pas pour affirmer que la méditation enraye le vieillissement, un processus extrêmement progressif et lent. L’étude Silver Santé Study, qui est centrée sur cet enjeu, a donc posé le jalon beaucoup plus loin, évaluant les changements non plus à deux, mais à 18 mois. C’est l’une des grandes originalités de ce programme et une gageure du point de vue de l’organisation, car cela implique de trouver des volontaires, prêts à s’engager sur une telle durée.

Dans six pays d’Europe, des équipes de chercheurs très spécialisées vont se concentrer sur différents aspects de la problématique du vieillissement cérébral. Cette étude fait la part belle à la méditation, mais pas seulement. Elle s’intéresse tout autant à l’apprentissage d’une langue étrangère, en l’occurrence l’anglais, qui stimule lui aussi les fonctions cérébrales et permet de préserver l’encéphale de l’usure.

Couverture Silver Santé Study

Concrètement, que va-t-il se passer à Caen ?

Le volet caennais de l’étude, qui va démarrer en janvier 2017, doit porter sur 126 participants.  Ils seront répartis au hasard en trois groupes. Dans l’un, on suivra un programme de méditation, dans l’autre, on apprendra l’anglais et dans le troisième, on ne fera rien de particulier.

Les volontaires vont se prêter à une vaste batterie d’examens au démarrage et à la fin de l’étude. L’IRM est bien sûr à l’honneur. Elle va permettre de visualiser la structure du cerveau dans son ensemble, de “zoomer” sur des zones particulièrement mises à mal par le vieillissement, d’observer l’évolution des connexions neuronales ou encore de suivre des protéines impliquées dans la maladie d’Alzheimer. Par ailleurs, le protocole prévoit une étude très détaillée du sommeil, des questionnaires sur les facteurs de vie, des tests cognitifs (mémoire, attention, langage…) et des examens sanguins en rapport avec le vieillissement, l’état de santé général, l’immunologie ou le niveau de stress.

En comparant les résultats au démarrage et au terme de l’expérience, on devrait pouvoir identifier et mieux caractériser les inflexions du processus de vieillissement et de neuro-dégénérescence. Les chercheurs pensent que la méditation et l’apprentissage d’une nouvelle langue auront un même impact sur certaines aires cérébrales, comme le Cortex cingulaire antérieur (situé à l’avant du cerveau), mais agiront de façon différenciée sur d’autres, comme l’insula, très impliqué dans la gestion des émotions, et qui sera probablement plus impactée par la méditation que l’apprentissage d’une langue.

— La méditation pleine conscience —

Stéphanie Maulay, Ô Cœur de l'Être

Stéphanie Maulay (voir notre vidéo) enseigne la méditation de pleine conscience au sein du centre Ô Cœur de l’Être, Centre de pleine conscience et santé holistique situé à Rennes.

Il est avéré que la méditation de pleine conscience a un intérêt thérapeutique pour prévenir les rechutes dans la dépression et pour traiter les états anxieux ou les douleurs chroniques, suivant un programme développé aux Etats-Unis par le Pr Jon Kabat-Zinn, pionnier du domaine. Alors que l’Europe découvre à peine son travail, beaucoup d’hôpitaux américains pratiquent depuis de nombreuses années ces exercices de méditation, enseignés dans de grandes facultés de médecines.

Inspirée de pratiques bouddhiques millénaires, mais tout à fait laïque et codifiée par des scientifiques occidentaux, la pleine conscience, ou en anglais mindfulness, est une technique de méditation qui consiste à focaliser toute son attention sur l’instant présent et à observer ce qui passe dans son corps et son esprit, comme autour de soi, sans jugement de valeur. On ne se demande pas si les sensations sont agréables ou non, on ne cherche pas à contrôler ses émotions ou à comprendre quoi que ce soit, on se contente de ressentir les choses, de les observer avec un certain détachement, qu’il s’agisse de son propre souffle, de sensations corporelles ou du flot de ses pensées.

POUR ALLER PLUS LOIN

• Le site du programme Silver santé Study
• La plateforme d’imagerie biomédicale Cyceron
• Le site du centre de méditation Ô Cœur de l’Être

Crédits

Vidéo et photo : © Ethnomedia / jcm pour Apivia Prévention