C’est tout neuf, un pharmacien peut vérifier un grain de beauté en prenant des photos qu’il transmet à des dermatologues pour le diagnostic. Bientôt les machines prendront-elles complètement le relais… ?

Enjeu de santé publique, le dépistage précoce du mélanome malin, l’un des cancers de la peau les plus agressifs, permet de soigner celui-ci. Mais le diagnostic intervient trop souvent trop tard et, là, le cancer est plus avancé et difficile à traiter. D’après le Centre international de recherche sur le cancer, agence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 232.000 cas de mélanome malin sont déclarés chaque année et 55.000 personnes en meurent. En France, les chiffres sont respectivement de 14.000 et 1.800. Or, les Français rechignent à aller montrer leur peau au dermato. En cause, une chute du nombre de dermatologues et en conséquence de longs délais d’attente.
Bien conscients de l’enjeu, les médecins se mobilisent. En mai dernier, du 14 au 18, c’étaient 300 dermatologues qui proposaient un dépistage gratuit dans leur cabinet.

Depuis juin, les pharmaciens leur emboîtent le pas et reçoivent sans rendez-vous en officine les personnes désireuses de se faire dépister. Hop, deux clichés détaillés du grain de beauté en question, qui seront ensuite examinés par des dermatologues certifiés. Pour l’instant, trois pharmacies du réseau Pharmabest proposent ce service, à Paris, Alès et Marseille. L’objectif est d’équiper une soixantaine d’officines du matériel nécessaire d’ici la fin de l’été. Et l’expérimentation pourrait rapidement s’étendre à d’autres pharmacies.

Cette initiative de Pharmabest est soutenue par le Syndicat national des dermatologues, mais vivement attaquée par plusieurs autres organisations dont la Société française de dermatologie (SFD). Action de sensibilisation au dépistage et à la protection solaire pour les uns, faux sentiment de sécurité et démarche mercantile pour les autres, le débat est en train de monter.

Parallèlement dans l’actualité, des résultats étonnants ont paru dans la revue Annals of Oncology. Une équipe de chercheurs allemands, français et américains a conçu un algorithme d’intelligence artificielle pour dépister le mélanome et il s’est révélé plus performant qu’une équipe de dermatologues.
Non seulement l’ordinateur « a manqué moins de mélanomes », mais il a également « fait moins d’erreurs de diagnostic consistant à voir des mélanomes dans des grains de beauté bénins », ce qui « aboutirait à moins d’opérations inutiles » selon un communiqué des scientifiques.

En résumé, s’il est clair que pour pallier le manque de praticiens, l’essor de la télédermatologie est souhaitable, l’intelligence artificielle a ses limites et ne reste qu’un outil supplémentaire. En effet, rien ne remplace un examen clinique approfondi de tout le corps, car le praticien dispose alors d’éléments de contexte qui contribuent à l’aider à poser un diagnostic et à ne pas risquer de passer à côté d’une autre pathologie. Alors, en attendant le RDV chez le dermato, en cas de doute, on peut se rendre chez son médecin généraliste qui lui est capable de donner une tendance et une orientation.

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