Faute d’investissements dans la recherche et d’un usage raisonnable des antibiotiques, leur déclin pourrait coûter cher en vies humaines.

Un an après l’évocation de la résistance aux antibios comme d’une « menace fondamentale » par les Nations Unies, l’OMS, son agence sanitaire, tire de nouveau le signal d’alarme : « le monde commence à manquer d’antibiotiques ». Sur 51 produits en cours de développement, 8 seulement seraient innovants. C’est bien trop peu alors que les bactéries multi et ultrarésistantes sont de plus en plus courantes. A l’horizon 2050, ce fléau pourrait devenir plus meurtrier que le cancer.

On pense bien sûr aux ravages de la tuberculose et aux coriaces bactéries qui sévissent dans les zones tropicales, mais Slate prend l’exemple commun d’une infection urinaire qui dégénère pour bien dire que « les infections résistantes aux antibiotiques, ça n’arrive pas qu’aux autres ».

Le Figaro a recensé l’an dernier les « pistes d’une médecine sans antibiotique ». Si la recherche sur de nouvelles molécules patine, faute de moyens, d’anciennes recettes ont le vent en poupe. Ainsi « un vieil antibiotique surpuissant et triple action » fait parler de lui et, à Lille, des chercheurs semblent avoir trouvé un moyen de supprimer la résistance à un antibio qui ne faisait plus d’effet contre la tuberculose.

Par ailleurs, on assiste à la résurgence d’une technique en vogue il y a un siècle, la phagothérapie, qui met à contribution des virus « mangeurs » de bactéries ; ou encore, dans le cas de plaies cutanées surinfectées, l’asticothérapie. Cela reste marginal.

Le manque d’implication des laboratoires pharmaceutiques est un problème.
On comprend mieux leur faible intérêt pour les antibiotiques à la lecture d’Allodocteurs. Deux produits ont été lancés l’an dernier en Europe, et seulement neuf en cinq ans. Pour éviter que les bactéries ne s’y adaptent, leur utilisation est cantonnée à l’hôpital dans des cas pointus. Les labos privés n’y trouvent pas leur compte économiquement. C’est ce qui fait dire au chef du département pharmacie de l’hôpital Henri-Mondor de Créteil qu’il faut créer « des laboratoires pharmaceutiques publics pour les médicaments pas assez rentables ».

L’un des autres chevaux de bataille est, bien sûr, de revoir du tout au tout la politique de prescription des antibiotiques qui participe du problème. Aux États-Unis, un tiers des prescriptions sont inutiles. En France, malgré les campagnes de sensibilisation, la consommation est repartie à la hausse. On est loin de « l’utilisation raisonnée » que prône PourquoiDocteur. Espérons que l’apparition de tests d’efficacité permettront de réduire les prescriptions d’antibiotiques à large spectre.

• En vidéo : une très intéressante interview du Pr Courvalin, de l’Institut Pasteur.

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