L’Anses alerte à nouveau sur les dangers d’une concomitance de la diminution de l’activité physique et de l’augmentation des temps cumulés de sédentarité chez les jeunes. En gros, l’image de l’ado affalé dans le canapé et absorbé par sa console de jeu n’est pas qu’un stéréotype. Et le fait que ce comportement soit dangereux n’est pas une légende.
Fin janvier dernier, l’émission Grand reportage d’Aurélie Kieffer, sur France Culture, était consacrée à la menace qui pèse sur la santé des futurs adultes que sont les adolescents d’aujourd’hui qui ne bougent pas assez. Une excellente émission, introduite par un reportage de Jérôme Val, dans laquelle la journaliste analyse avec son invité, le Pr François Carré, les causes et les conséquences de cette inactivité physique, qui concerne les deux tiers des 11-17 ans. Si vous avez des ados dans les parages, demandez-leur d’oublier pendant une heure leur fréquence préférée et leurs streams de rap, pour laisser résonner cette émission, que je vous conseille.
Trop de temps d’écran, pas assez d’activité physique
Plus exactement, selon une étude de l’Anses (l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) publiée en novembre 2020, 66 % des 11-17 ans sont soumis à « un risque sanitaire préoccupant », défini par l’agence comme le dépassement simultané de deux seuils sanitaires : « plus de 2 heures de temps d’écran et moins de 60 minutes d’activité physique par jour ».
Pour ne rien arranger, 49 % de cette même tranche d’âge présente un risque sanitaire très élevé, caractérisé par plus de 4h30 de temps d’écran journalier et/ou moins de 20 minutes d’activité physique par jour, certains cumulant même ces deux critères et se trouvant donc particulièrement exposés. Cela vous évoque des situations connues ? Pas étonnant, vu la proportion de jeunes concernés. L’Anses indique d’ailleurs qu’il est « extrêmement rare qu’une évaluation des risques montre que les deux tiers de la population étudiée présentent un dépassement des seuils sanitaires ». Elle alerte donc les pouvoirs publics, et insiste sur la nécessité de promouvoir des actions pour lutter contre la sédentarité et pour développer l’activité physique des adolescents.

Le temps passé par les adolescents devant les écrans inquiète l’OMS – © Lisa Fotio
Un risque sanitaire mondial
Cette tendance inquiétante est mondiale. L’OMS (Organisation mondiale de la santé), à la suite d’une étude qu’elle a dirigée en 2019, considère que le manque d’activité chez les adolescents est un problème majeur et précise que « plus de 80 % des adolescents scolarisés – 85 % des filles et 78 % des garçons – ne respectent pas la recommandation actuelle, qui est de faire au moins une heure d’activité physique par jour ». Oui, les filles bougent globalement moins que les garçons.
En cause, essentiellement, le temps passé devant les écrans, que les restrictions sanitaires, prises depuis un an, n’ont pas aidé à diminuer. Et du temps assis ou couché que l’on ne passe pas en mouvement, c’est aussi du temps pendant lequel on libère des hormones qui donnent faim. Sédentarité et grignotage font donc bon ménage et, pour ne rien arranger, c’est par le sucré, le salé, et le très calorique que les papilles sont alors attirées. Conséquence : une augmentation de l’indice de masse corporelle, qui peut conduire au surpoids, puis à l’obésité. En plus de bouleverser le métabolisme, comme le rappelle Laure Cailloce dans Le Journal du CNRS, le manque d’activité physique a des effets sur la qualité du sommeil, dont on connait le rôle essentiel sur le développement hormonal, la croissance, l’humeur, la qualité des apprentissages… Alors profiter de la vie, bien calé devant sa console vidéo : oui, mais avec modération.
Car nous sommes des animaux et nous avons physiologiquement besoin de mouvements, explique Irène Margaritis, chef de l’évaluation sur la nutrition et les risques nutritionnels à l’Anses, dans le reportage de France Culture. De fait, nous sommes génétiquement programmés pour bouger. Mais les études montrent que les nouvelles générations ont perdu entre 25 et 30 % de capacité physique dans le domaine de l’endurance, de la force et de la vitesse, ce qui représente, selon Jean Claude Vollmer, expert en préparation physique, une dégradation alarmante des conditions physiques des jeunes.
Monter au sommet de la tour Eiffel (674 marches), baisser le temps d’activité de son écran de téléphone de 15 minutes, consacrer ce temps à faire 100 flexions sur 24h, consulter l’office municipale des sports, s’inscrire à un club de sport quelle que soit la pratique, télécharger une application d’activité physique et s’y tenir…
Le n°454 (décembre 2020) de La Santé en action est dédié à la promotion de l’activité sportive et physique. On y apprend, en particulier, comment stimuler la pratique de l’activité sportive et physique, la part que peuvent prendre les clubs sportifs, les collectivités et les différents lieux de vie pour promouvoir la santé des populations, grâce aux contributions d’une quinzaine d’experts qui présentent un état des connaissances scientifiques et des pratiques, et synthétisent les recommandations pour les professionnels de l’éducation, du social, de la santé.
Une expérimentation des pouvoirs publics
Fin novembre 2020, le ministère de l’Éducation nationale a lancé l’opération 30 minutes de sport par jour à l’école, expérimentée dans trois académies (Créteil, Poitiers, Besançon) et inspirée de l’initiative Daily mile, créée en Écosse en 2012 pour faire courir chaque jour un mile (un peu plus de 1500 mètres) les enfants de toutes les écoles. En plus d’être un pas vers une éducation qui tienne compte de l’enfant dans sa globalité, gageons que cette initiative sera généralisée et permettra de rattraper le retard dans la prévention des dangers dûs à la sédentarité des adolescents. Car être physiquement actif pendant l’adolescence c’est, en particulier, favoriser sa santé cardiorespiratoire et musculaire, mais aussi l’état de ses os et la maîtrise de son poids. Autant d’effets qui continuent de se faire ressentir à l’âge adulte.
POUR ALLER PLUS LOIN
• A écouter :
« Comment aider les adolescents à adopter un mode de vie plus sain, comment réactivez chez eux le plaisir si simple qu’ont les enfants, celui de courir, gambader, sauter ? » C’est la question que pose Aurélie Kieffer dans l’émission Grand Reportage du 29 janvier 2021 : Trop d’écrans, pas assez d’activité physique : les adolescents en danger.
• A lire :
Pr François Carré , Danger sédentarité, Le cherche midi, 2013.
Résumé de l’éditeur : La sédentarité tue sans bruit. Les conclusions scientifiques le prouvent, ne pas pratiquer d’exercice physique favorise le développement de nombreuses pathologies au pronostic grave, telles que l’obésité, le diabète, les maladies cardio-vasculaires ou encore les troubles musculo-squelettiques. Une seule et simple thérapeutique préventive et curative aux multiples effets bénéfiques : bouger !
À travers six portraits d’hommes et de femmes, ce livre offre des conseils faciles à appliquer et adaptés à l’âge et au mode de vie.
Objectif : combattre les méfaits de la sédentarité et retrouver ainsi le plaisir de se sentir bien dans sa tête et dans son corps, pour vivre mieux et plus longtemps.
Être en bonne santé dépend de nous : alors, bougeons !
Crédits
Photos : © Gabby K – Lisa Fotio
A LIRE DANS LA MÊME RUBRIQUE
Des conseils pour passer un été en toute sécurité
Parce que les soirées sont douces et les journées ensoleillées, l’été est souvent synonyme de liberté et d’insouciance. Un sentiment renforcé par les grandes vacances. Pourtant, les risques et les dangers sont multiples : noyades, piqures d’insectes, insolation, etc. Adoptez la plus grande vigilance pour passer des vacances sereines et agréables
Juin vert. Un mois de mobilisation contre le cancer du col de l’utérus
Créé il y a dix ans sur le modèle d’octobre rose, Juin vert est le mois de sensibilisation contre le cancer du col de l’utérus. La campagne veut rappeler que ce cancer est l’un des rares qui peut être évité grâce à la vaccination et au dépistage.
Le diabète progresse sur l’Île de la Réunion
Environ 80 000 Réunionnais sont pris en charge pour un diabète. Depuis 2020, les professionnels de santé se mobilisent face à cette pandémie parfois oubliée, pour améliorer la prévention, le dépistage et la prise en charge de la maladie.
Le diabète
En France, 5% de la population est traitée pour un diabète, cette maladie chronique qui se caractérise par une hyperglycémie, c’est-à-dire un excès de sucre dans la sang. Selon les prévisions, cette pandémie silencieuse atteindra 10% de la population mondiale d’ici 2045.
Du baby-blues à la dépression post-partum. Le mal de mère
Les filles aiment le rose et, lorsqu’elles deviennent grandes, elles pleurent de bonheur quand elles ont un bébé, qu’elles allaitent dans une allégresse proche de l’extase. Voilà pour la fable, qui a la vie dure malgré les évidences. Car si l’expérience de donner la vie est merveilleuse, elle fait aussi vivre aux femmes des changements qui peuvent déstabiliser la santé mentale de certaines. Un fait qui peine toujours à être vraiment reconnu.
Handicap : la lente progression vers l’accessibilité
Que l’on soit en situation de handicap physique ou sensoriel, l’accessibilité aux lieux et aux informations est encore très problématique en France. Or, les personnes en situation de handicap ne peuvent être autonomes que si l’environnement est adapté. Aujourd’hui, trop d’obstacles quotidiens continuent à les discriminer.