Classé au premier rang mondial par l’OMS en 2000, le système de santé français ne semble plus aujourd’hui si performant.

Au-delà du chiffre important (7,7 milliards d’euros en 2014) du déficit financier de l’assurance-maladie, qui n’est pas propre à la France, le recul est aussi d’ordre qualitatif, comme en témoigne la progression du renoncement aux soins qui a concerné en 2013 près d’un Français sur trois : soit 33%, contre 11% en 2009, selon le Baromètre Europ assistance. 

Quelles sont donc les causes de cette tendance préoccupante qui n’a pas son équivalent dans les pays de l’Union européenne, hormis la Grèce où la politique d’austérité a laissé exsangue le système de santé ?

Sans surprise, il apparaît que les personnes ne bénéficiant pas d’une complémentaire-santé sont deux fois plus nombreuses que les autres à renoncer aux soins (soit 30,4% contre 15,3%, selon le magazine Viva, 15 février 2012). De fait, si les mutuelles ont largement contribué depuis trente ans à amortir les déremboursements continus de la Sécurité sociale et à démocratiser l’accès aux soins, celles-ci ont vu depuis 2005 leur fiscalité s’envoler sous le coup des règlementations européennes, au moment même où elles subissaient les transferts de charges consécutifs à la réduction des dépenses publiques. Il s’en est suivi mécaniquement une hausse des cotisations qui pèse lourdement sur les ménages, dans un contexte socio-économique dégradé depuis la crise de 2008. C’est ainsi qu’en 2012, selon une étude de l’IRDES (institut de recherche et de documentation en économie de la santé), 3,3 millions de personnes, soit 500 000 de plus qu’en 2010, ne pouvaient plus souscrire à une complémentaire, faute de ressources suffisantes. Le taux de couverture par les complémentaires a diminué pour la première fois en 2014, alors qu’il était en progression continue depuis les années 1970.

Pourtant, la répartition du financement de l’assurance-maladie demeure à peu près constante, et le reste à charge pour les ménages est passé, selon les Comptes nationaux de la Santé 2013, de 9% à 8 ,8%… Mais cette diminution ne pèse pas lourd au regard de l’augmentation des cotisations sociales et mutualistes. Par ailleurs, d’autres raisons expliquent qu’une part croissante de Français ont de plus en plus de mal à se soigner. Citons parmi celles qui sont les plus fréquemment invoquées : les dépassements d’honoraires des médecins libéraux en secteur II, qui ont progressé de 2,9% en 2013, la difficulté à obtenir dans un délai raisonnable un rendez-vous avec un médecin spécialiste conventionné de secteur I (sans dépassement d’honoraires), les déserts médicaux dans certaines régions, les réticences de certains praticiens à soigner les bénéficiaires de la CMU.  Les restes à charge sont encore plus importants pour les personnes souffrant de pathologies nécessitant des traitements coûteux, comme le cancer. Ainsi les inégalités sociales se traduisent par une marginalisation sournoise des catégories économiquement vulnérables par rapport au système de santé. 

POUR ALLER PLUS LOIN

• Le baromètre Santé & Société – Europ Assistance / CSA – 2013 (PDF)
• L’article de Viva Magazine en ligne sur viva.presse.fr
• Le site de l’IRDES
• Les comptes nationaux de la santé 2013 (PDF)
• Le rapport 2013 du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie (HCAAM) (PDF)
Voir notamment p.38 concernant les restes à charge en cas d’ALD
• Un article de la Mutualité française sur les restes à charge à l’hôpital
• Les propositions de la Mutualité française visant à la réduction de la fracture sanitaire
• L’article de latribune.fr

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